Les chercheurs ont constaté que dans les cinq années suivant l’apparition d’une épidémie, l’inégalité augmente fortement. Ils ont fait cette constatation au moyen du coefficient de Gini, qui mesure la répartition des revenus dans la population. Cet indice varie de 0 à 1, le nombre 0 traduisant une répartition parfaitement égale des revenus, et le nombre 1 indiquant que 100 % des revenus devraient être redistribués pour atteindre l’égalité parfaite.
L’étude montre que l’indice augmente de 1,25 % dans les cinq années après la pandémie. Ce n’est pas rien. Au cours de ces cinq ans, la part de 20 % des gros salaires dans le total des revenus augmente de 46 %, contre 6 % à peine pour le quintile des revenus les plus modestes.
Cet effet se manifeste principalement dans le canal du marché de l’emploi. Les personnes qui ont suivi des études supérieures sont à peine touchées. L’emploi de personnes qui n’ont reçu qu’une formation de base recule de 5 % pendant cette période.
Aujourd’hui encore, nous faisons la même constatation. L'Organisation internationale du travail (OIT) a publié un aperçu qui montre qu’à l’échelle mondiale, les quatre secteurs les plus touchés - sur douze secteurs au total – sont aussi ceux où les revenus sont inférieurs aux revenus moyens.
En Belgique, le niveau de revenu dans les quatre secteurs les plus impactés par l’épidémie du coronavirus en 2020, selon BNP Paribas Fortis, oscille entre les 65 et 90 % de la moyenne totale de l’ensemble des secteurs.
Les gouvernements doivent mettre tout en œuvre pour éviter une reprise en forme de K. Cela conduirait en effet à une inégalité croissante et au populisme qui l’accompagne. De ce point de vue, le soutien hautement ciblé aux personnes les plus touchées constitue un élément important. Les paquets d’aide généraux distribués à tout le monde et n’importe qui sont de beaux cadeaux, mais sont surtout un gaspillage du peu d’argent disponible.
Il est plus important encore d’investir doublement dans le recyclage et la réorientation des travailleurs touchés. Dans des secteurs tels que l’horeca, le commerce de détail de produits non alimentaires et l’aviation, l’emploi restera structurellement plus bas qu’avant la crise. En plus, le choc du coronavirus accélère la vague de digitalisation, qui exige également une politique du travail plus active. Lors de l’élaboration de la politique de relance, la priorité absolue doit être accordée à la formation des travailleurs.