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Macroéconomie
15.07.2020
Sylviane Delcuve Senior Economist

2020 : Quand l’endettement s’emballe

La crise du Coronavirus sera vraisemblablement responsable d’une nouvelle flambée de l’endettement des entreprises dans le monde. La société Janus Henderson vient de publier un premier rapport sur son tout nouvel indice, qui annonce une hausse de 12% de l’encours en 2020, et qui détaille la situation par secteur et par pays, en tentant de tirer quelques conclusions sur le monde d’après.
 

Juillet 2020 a vu la publication d’un nouvel indice relatif à l’endettement des entreprises. Il s’agit du Janus Henderson Corporate Debt Index. Cet indice retrace l’évolution de la dette et de la situation financière globale de près de 900 entreprises dans le monde et sa première édition, parue il y a quelques jours à peine nous apprend que l’endettement, déjà en très forte hausse depuis 5 ans suite à la faiblesse record des taux d’intérêt, a de grandes chances de s’être encore accru à cause du Coronavirus. Le rapport illustre aussi les différences de comportement par secteur.

Petit retour en arrière

Au cours des années 2014-2019, la dette des entreprises avait flambé suite aux pratiques de taux extrêmement bas menées par les différentes banques centrales du monde entier. Sur la seule année 2019, la dette totale avait même progressé de $625 milliards, ce qui représentait la plus forte progression annuelle depuis 5 ans. Une bonne partie de cet endettement supplémentaire avait servi à financer des fusions et acquisitions ou à racheter ses propres actions.

Le Covid a accentué la tendance

Quand l’économie mondiale s’est brusquement arrêtée, en mars 2020, la plupart de ces grandes entreprises ont emprunté massivement, soit sur les marchés obligataires, soit en banque, soit en recourant aux plans d’urgence mis sur pied par les gouvernements, mais cette fois, le but n’était plus de financer le moindre rachat d’actions ou la moindre fusion, mais bien de tenir le coup en s’assurant d’avoir assez de réserves pour passer le creux conjoncturel provoqué par le lock-down.

Une dette en hausse de $1000 milliards sur un an

Suite à la crise sanitaire, le rapport nous apprend que la dette corporate mondiale pourrait augmenter de 12% en 2020, soit $1000 milliards de plus, ce qui porterait l’encours total à $9300 milliards. Le recours au marché obligataire a déjà été à lui tout seul de $384 milliards sur la période janvier-mai 2020 et il faudra y ajouter les autres dettes (bancaires, gouvernementales, etc) ….

Les USA et l’Allemagne champions de la dette

Le rapport nous apprend également que les entreprises américaines sont responsables à elles seules de 50% de l’endettement des entreprises dans le monde (avec un encours de 3900 milliards à fin 2019) et que le deuxième pays le plus endetté est l’Allemagne, où la société automobile VW est responsable à elle seule d’une dette de $192 milliards.  

Certaines entreprises sont très riches

Enfin, le rapport nous apprend que si l’endettement a flambé et flambe toujours dans le monde, environ 25% des sociétés suivies par Janus Henderson n’ont aucune dette, certaines étant même assises sur des montagnes de cash : c’est par exemple le cas d’Alphabet, qui dispose d’un trésor de $104 milliards de cash.

Anges déchus en vue ?

Comme toutes les crises, celle-ci apportera son lot d’anges déchus. Il est déjà évident que les cash-flows et les profits seront beaucoup plus bas en 2020 pour un grand nombre d’entreprises. Pour certaines, avoir eu recours à l’endettement s’avérera salutaire, mais pour d’autres, qui se sont endettées pour survivre sans vraie vision du monde d’après, cette dette pourrait s’avérer « suicidaire ». L’avenir nous dira qui sera dans quel camp. La réponse tiendra en une phrase : que feront les entreprises de tout cet endettement ?

 

Les opinions exprimées dans ce blog sont celles des auteurs et ne représentent pas nécessairement la position de BNP Paribas Fortis.
Sylviane Delcuve Senior Economist
Master en Economie de l’ULB Economiste de la salle des marchés de la première banque du pays pendant 10 ans Responsable crédit pour les produits structurés. Nombreuses expériences dans l’enseignement : ULB, Solvay, ULG, HEC St Louis En savoir plus

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