L’économie américaine se porte très bien et la banque centrale le sait : voilà bientôt 3 ans qu’elle serre la vis au niveau monétaire : les taux directeurs ont été remontés à de nombreuses reprises, et le bilan de la Fed rétrécit, comme le montre le graphique ci-contre.
La taille de ce bilan est scrutée par les analystes du monde entier, car l’ampleur de sa diminution donnera un message fort au secteur bancaire. Tout le dilemme est là : quelle devrait être la bonne taille de ce bilan, compte tenu des conditions économiques, et du souhait de chacun de s’assurer que les banques commerciales disposent de suffisamment de liquidités et d’actifs stables pour pouvoir être gérées convenablement en cas de nouvelle crise.
Les principales banques centrales du monde détiennent en moyenne 30% de leur dette publique
Après 2008, les principales banques centrales du monde se sont mises à acheter massivement du papier public, afin d’accroître la liquidité. Une étude du Financial Times estime qu’elles détiennent environ 30% de leur dette publique, contre seulement 15% avant 2008. A part aux USA, où la planche à billets a officiellement été arrêtée en 2014, ailleurs, les injections de liquidités continuent. Certains y voient une incursion inutile du secteur public dans les marchés financiers, car quand les banques centrales achètent des quantités définies de papier public, tous les mois, pour accroître la liquidité, la frontière entre financement du secteur public et banques commerciales devient floue.
Quelle diminution du bilan de la Fed ?
En 2017, le bilan est resté stable, car il faut du temps pour que l’arrêt de la planche à billets se traduise par une diminution du bilan. Il faut en effet attendre que le papier acheté arrive à échéance. En 2018, on estime par contre que le bilan de la banque centrale américaine aura fondu de $315 milliards et l’agence de rating Fitch parie sur une fonte de près de $437 milliards en 2019. La question qui taraude les marchés est la suivante : que se passera t’il si le bilan diminue trop ?
Si l’actif fond, le passif fond aussi
La réduction de la taille du bilan implique une réduction équivalente des engagements de la banque centrale. Ceux-ci se répartissent en 3 grandes catégories : les billets et les pièces en circulation, les dépôts des banques commerciale auprès de la banque centrale et les autres dettes de la banque centrale (essentiellement ses fonds propres). Si l’actif diminue, ce ne sont pas les billets en circulation qui vont diminuer, ni les fonds propres, mais bien les dépôts des banques commerciales qui chutent. Les chiffres le confirment d’ailleurs et ce n’est pas forcément une bonne chose, car la réglementation s’est durcie depuis la crise. Les banques sont obligées de garder des coussins de sécurité plus importants, ce qui implique qu’elles apprécient de pouvoir garder d’importants dépôts en cash auprès de leur banque centrale, plutôt que de détenir des actifs « sans risque », comme elles le faisaient avant.
Si le bilan devait diminuer trop, on verrait des tensions apparaître sur les taux d’intérêt, et la banque centrale n’a sans doute pas envie de se faire reprocher d’introduire de la volatilité, surtout dans le contexte actuel.
Affaire à suivre ….