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BNP Paribas Fortis Economie
27.11.2019

PERSPECTIVES ÉCONOMIQUES ET STRATÉGIE D’INVESTISSEMENT POUR 2020

Koen De Leus et Philippe Gijsels, respectivement Chief Economist et Chief Strategy Officer de BNP Paribas Fortis, présentent leur vision macroéconomique pour 2020 et expliquent comment celle-ci se traduit dans la stratégie de placement de BNP Paribas Fortis.

Pour l’an prochain, nous prévoyons un nouveau ralentissement de la croissance dans les plus grandes économies. C’est une conséquence du choc de ‘démondialisation’ qui résulte de la politique menée par le président américain Donald Trump. En Europe, après la crise des subprimes de 2008 et la crise bancaire de 2012, c’est le troisième choc à frapper le continent au cours de la dernière décénnie. Étant donnée sa grande dépendance de l’exportation (et la faible demande intérieure), l’Europe souffre beaucoup du ralentissement mondial de la croissance.

Mais l’Europe n’est pas seule à gémir sous l’incertitude accrue concernant la politique américaine. Petit à petit, la croissance américaine elle-même s’effrite. Parmi les victimes figure aussi la Chine, évidemment, qui se trouve dans l’œil de la tempête commerciale. Il est frappant de constater que l’État chinois ne soutient la croissance qu’avec parcimonie. Les autorités chinoises semblent accepter le ralentissement et visent surtout la stabilité à long terme.

Koen De Leus, Chief Economist chez BNP Paribas Fortis : « La stabilisation de la dette et l’endiguement de la finance de l’ombre figurent au premier rang des priorités de la Chine. Le moteur de croissance du monde décélère, et cela se ressent dans le monde entier. »

Taux d’intérêt

Compte tenu de tous ces éléments, nous prévoyons encore deux nouvelles baisses des taux aux États-Unis en 2020. En Europe, la marge de manœuvre sur le plan monétaire a presque entièrement été utilisée. Et la faute n’en revient pas à la seule Banque centrale européenne. Car les tendances à long terme ont fait baisser le taux (neutre). Le taux neutre est le taux qui équilibre l’offre d’argent (l’épargne) et la demande d’argent (l’investissement et la consommation).

Depuis les années 1970, l’offre d’épargne a augmenté en raison de l’inégalité croissante et du vieillissement de la population. La demande de dépôts a quant à elle reculé. Le ralentissement structurel de la croissance de la production et de la population pèse sur le rendement du capital investi, ce qui fait que les entreprises réduisent leurs investissements. Ensemble, ces éléments ont fait perdre 7 points de pourcentage au taux neutre. En revanche, des gouvernements du monde entier ont alourdi leurs dettes, développant ainsi un plus gros appétit pour l’épargne. Les pouvoirs publics ont également amélioré la sécurité sociale, ce qui a fait que les citoyens avaient un peu moins besoin de mettre de l’argent de côté. Cependant, l’effet net de l’ensemble des tendances à long terme sur le taux neutre réel se traduit toujours par une baisse de 3 points de pourcentage. Le revirement prochain de ces tendances, et donc la hausse structurelle du taux neutre, n’est pas en vue actuellement.

Dans le contexte actuel de taux d’intérêt extrêmement bas se pose de plus en plus la question de savoir si nous ne ferions pas mieux d’utiliser un autre remède contre le choc de ‘démondialisation’ actuel. Un nouvel affaiblissement du taux d’intérêt ne permettra pas de dissiper l’incertitude. Nous devons trouver un autre moyen de dynamiser l’économie.

Politique fiscale

Plusieurs éléments plaident en faveur d’une politique fiscale expansive. Premièrement, le taux d’intérêt réel est négatif dans la majorité des pays européens. S’il est vrai que les épargnants perdent du pouvoir d’achat, l’État peut emprunter à ce taux d’intérêt réel négatif et compenser ainsi son retard d’investissement des dernières décennies.

Deuxièmement, le timing est parfait. L’effet de croissance positif des investissements publics est bien plus important lorsque les banques centrales n’élèvent pas les taux d’intérêt. La Banque centrale européenne a clairement indiqué que cela n’arriverait pas dans les années à venir. L’effet se fait aussi sentir davantage en période de difficultés économiques. Pendant ces périodes, le chômage est en effet plus élevé et il y a donc de la main-d’œuvre en suffisance. Lors de grands travaux publics, par conséquent, cette main-d’œuvre n’est pas retirée du secteur privé (l’effet d’éviction), ce qui réduirait l’effet de croissance.

Koen De Leus : « Les risques semblent également moins grands que dans le passé. Notre carte des scores fiscaux montre que tous les pays ont réalisé d’importantes améliorations depuis la crise, et ce en grande partie grâce à des taux d’intérêt bas. La Belgique aussi a vu sa situation fiscale s’améliorer, même si nous faisons face à un problème de déficit budgétaire croissant. Les recettes et dépenses courantes doivent être équilibrées. Une fois que cet équilibre est atteint de manière structurelle, il faut créer de l’espace pour des investissements supplémentaires à long terme. »

Indice ‘FutureProof’

De tels investissements doivent également permettre l’accroissement structurel du potentiel de croissance de la Belgique. Notre indice ‘FutureProof’ mesure la performance de la Belgique par rapport aux autres pays de l’Union européenne (UE), et ce dans quatre domaines : la productivité, le marché du travail, les pouvoirs publics et les facteurs environnementaux.

Bien que notre pays ait avancé d’une position dans cet indice ‘FutureProof’ l’année passée, nous n’occupons toujours que la 15e place parmi les 28 pays de l’UE. Notre marché du travail, qui se caractérise par un taux de participation extrêmement bas et le deuxième plus haut taux de vacances d’emploi (la proportion de postes vacants par rapport au nombre total d'emplois) en Europe, reste notre talon d’Achille. Le potentiel est clairement là. Il reviendra cependant au nouveau gouvernement fédéral de présenter une vision claire à long terme afin que ce potentiel puisse être exploité.

Les marchés boursiers

En ce qui concerne les marchés boursiers, 2019 a été un grand millésime. Les pertes subies au cours du second semestre particulièrement difficile de 2018 ont largement été compensées. Il est très important de reconnaître l’énorme impact des actions des banques centrales, la Réserve fédérale des Etats-Unis en tête, suivie de très près par la Banque centrale européenne. Au deuxième semestre de 2018, nous vivions dans une économie mondiale qui se portait plus que bien. En outre, la croissance des bénéfices des entreprises avait enregistré une forte hausse. En revanche, les incertitudes géopolitiques et l’augmentation du taux d’intérêt américain suscitaient un sentiment particulièrement négatif sur les marchés boursiers.

Début 2019, nous nous attendions à trois hausses des taux d’intérêt par la Réserve fédérale. À la fin de l’année, nous constatons que cette prévision a été inversée : il n’y a eu pas moins de trois baisses. Ces baisses, combinées à l’affaiblissement d’incertitudes géopolitiques telles que les guerres commerciales et le Brexit, ont donné des ailes au marché.

Philippe Gijsels, Chief Strategy Officer chez BNP Paribas Fortis : « Si les banques centrales continuent d’inonder le marché de liquidités, et que les Américains et les Chinois concluent un accord commercial, la confiance dans l’économie réelle devrait pouvoir se raffermir. Cela nous permettrait de prolonger encore un peu la durée – déjà longue – du cycle économique. En ce qui concerne les marchés boursiers, l’histoire nous a appris que la hausse des taux d’intérêt est nettement plus importante qu’une économie forte et une bonne performance des entreprises. »

Si la récession ne se produit pas et que la politique monétaire reste souple, 2020 pourrait encore nous apporter quelques grands moments boursiers. Nos analyses indiquent clairement que les marchés baissiers coïncident presque toujours avec des récessions, ou les précèdent de peu. En vue des élections présidentielles, Donald Trump mettra tout en œuvre pour éviter la récession en 2020. S’il parvient à ses fins, cela pourrait déclencher un marché haussier qui serait non seulement le plus long, mais peut-être aussi le plus puissant dans l’histoire financière. Car il reste encore une énorme quantité d’argent hors circuit. Et comme on le voit souvent avec les sommets de long terme, les investisseurs sont loin d’être euphoriques.

Dans le contexte d’un marché boursier haussier et d’un marché en (légère) croissance, il se pourrait que le taux d’intérêt à long terme enregistre une faible hausse. Mais cette hausse sera sans doute limitée par l’assouplissement quantitatif. Bien que le dollar américain soit toujours surévalué, il reste la monnaie de réserve mondiale. Aussi longtemps que les marchés boursiers continuent de bien se porter et que le différentiel d’intérêt profite autant à la plus grande économie du monde, la baisse restera relativement limitée.

Métaux nobles et matières premières

Des marchés boursiers prospères, une économie en croissance, un taux d’intérêt légèrement orienté à la hausse et un dollar qui demeure assez fort : ce sont des éléments qui influent négativement sur l’or. Mais le taux réel reste particulièrement bas et les banques centrales poursuivront la diversification de leurs réserves au profit du métal noble.

Philippe Gijsels : « Nous croyons que le marché haussier de l’or subira peut-être un léger ralentissement, mais qu’il restera certainement intact. L’or peut sûrement rester en portefeuille. »

2020 sera peut-être aussi l’année où l’argent et le platine entameront un mouvement de rattrapage. En ce qui concerne le pétrole, nous ne prévoyons pas un trop grand recul, même s’il reste toujours une offre excédentaire. À moins d’un choc géopolitique, nous n’attendons donc pas non plus de miracles du pétrole.

Changement de paradigme

Depuis la fin de la crise de 2008-2009, les actions de valeur sont restées très en retrait par rapport aux actions de croissance. Sur cette même période, les marchés émergents ont accumulé un retard spectaculaire comparativement aux marchés plus matures. Nous pensons qu’il existe une réelle possibilité que ces tendances à long terme s’inversent en 2020.

Mais le thème de 2020 par excellence provient peut-être d’une source inattendue. Aussi bien Mario Draghi que Christine Lagarde, à qui il a passé le flambeau, ont déjà indiqué que le réservoir  des banques centrales servant à relancer l’économie était presque vide. Il faut à présent que les gouvernements reprennent une partie du travail.

Nous pourrions donc être à la veille d’un changement de paradigme, où les stimuli budgétaires viendraient compléter la politique monétaire. Cela permettrait aussi de prolonger le cycle économique. À terme, c’est-à-dire au-delà de 2020, cela pourrait donner un coup d’accélérateur à l’inflation et faire monter enfin les taux d’intérêt. Si Keynes devait sortir de son état d’hibernation, il ne serait pas une mauvaise idée pour l’investisseur d’envisager un certain nombre d’investissements dans le domaine de l’infrastructure. L’an prochain promet d’ores et déjà d’être intéressant.

Note : ce texte a été rédigé en date du 27 novembre 2019



Plus de dette publique lors d’une prochaine récession? - Koen De Leus



Des taux bas: la nouvelle norme ? - Koen De Leus



Des histoires qui influencent l’économie - Philippe Gijsels



L’or: une valeur sûre dans chaque portefeuille - Philippe Gijsels



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