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BNP Paribas Fortis Economie
30.11.2022

De l’espoir en période de crise

L’économiste en chef Koen De Leus et le stratégiste en chef Philippe Gijsels se penchent sur 2022, une année riche en évènements et en défis pour l’économie mondiale. Ils partagent également leur vision sur les perspectives économiques pour 2023.

2022 fut une année volatile et difficile sur les marchés financiers. La guerre en Ukraine a provoqué de nombreuses souffrances humaines et la crise énergétique qui en découle a surtout touché l’économie européenne. Mais la raison principale du recul de pratiquement tous les actifs est à trouver dans la forte hausse des taux. Dans cette optique, l’année 2022 représente une rupture totale avec le passé. À cause de la flambée inflationniste, le monde de la « Modern Monetary Theory » – où les pouvoirs publics stimulent l’économie, provoquant d’importantes pénuries, et où les banques centrales maintiennent les taux bas en rachetant les dettes – a été abandonné.

Koen De Leus: «La mainmise de l’inflation sur l’économie mondiale se poursuit. Mais les États-Unis semblent avoir dépassé le pic d’inflation et, avec la récente baisse des prix du gaz et de l’électricité, l’Europe peut aussi espérer des jours meilleurs. Cette année, l’inflation harmonisée – la mesure préférée de la Banque Centrale Européenne (BCE) – devrait se situer à 10,5% et nous nous attendons à 6,3% en 2023. En Belgique, le Bureau du Plan s’attend à un nouveau dépassement de l’indice à la mi-2023.» 

Spirale salaires-prix
Malgré tout, les banques centrales continueront à augmenter leurs taux d’intérêt, même si ces hausses risquent de provoquer une légère récession. Pour les États-Unis, nous nous attendons à un pic de 5,25% au premier trimestre de l’an prochain. Pour la BCE, nous nous attendons à un taux maximum de 3% au début 2023. Ces hausses de taux ont entre autres pour objectif de prévenir la spirale salaires-prix tant redoutée.

Le Fonds Monétaire International (FMI) a récemment analysé 79 périodes depuis les années 1960 d’au moins trois trimestres successifs au cours desquels les prix à la consommation ont rapidement augmenté et où les salaires nominaux ont suivi le même mouvement. Cette analyse démontre que cette situation ne génère une spirale persistante salaires-prix que dans un très petit nombre de cas. Malgré tout, les banquiers préfèrent jouer la sécurité.

Ce faisant, ils poussent presque certainement l’économie vers une récession. Pour la zone euro, nous nous attendons à une croissance négative à partir du quatrième trimestre de l’année 2022 jusqu’au deuxième trimestre de 2023. En Belgique, la récession a commencé un trimestre plus tôt, mais nous devrions également en sortir trois mois plus tôt. Aux États-Unis, la hausse systématique des intérêts à partir du deuxième trimestre 2023 devrait entraîner une baisse des résultats trimestriels et nous nous attendons à une contraction de 0,1% en 2023 et de 0,2% en 2024. Dans la zone euro, nous prévoyons un recul de 0,5% l’an prochain et une hausse de 1,3% en 2024. Pour la Belgique, nous nous attendons respectivement à des hausses de 0,2 et de 1,4%.

Conséquences pour le marché immobilier résidentiel
La hausse des taux et des coûts de l’énergie commence aussi à peser sur le marché de l’immobilier résidentiel. « L’appétit pour les gros achats » (Banque Nationale de Belgique) indique une forte baisse des achats. La hausse des taux hypothécaires fait également reculer l’accessibilité des logements à son plus bas niveau depuis le début des années 1980. Combinés aux nouvelles hausses des taux, ces indicateurs signifient que nous nous attendons à une légère baisse des prix des logements pour l’an prochain.

Koen De Leus: «À plus long terme, nous pensons que les prix des logements réaugmenteront progressivement. Avec le coût élevé de l’énergie et les nouvelles dispositions légales, les labels énergétiques devraient gagner en importance. La prise de conscience croissante du degré d’efficacité énergétique pourrait faire grimper les prix des maisons dotées d’un bon certificat PEB plus rapidement que ceux des biens mal isolés. Mais il ne faut pas exagérer cette différence.» 

Nos calculs montrent qu’une partie importante de cette différence est déjà intégrée dans les prix actuels. La différence de prix entre un logement disposant du pire certificat PEB et un logement avec le meilleur label énergétique se monte à environ 80.000 euros, ce qui, selon la plupart des études, correspond au coût d’une rénovation énergétique en profondeur, estimée entre 50.000 et 80.000 euros.

Les pouvoirs publics doivent aussi se montrer vigilants
Les ménages ne sont pas les seuls à souffrir de la hausse des taux. Les pouvoirs publics doivent aussi se montrer vigilants. Le taux d’endettement de la Belgique continue d’augmenter à cause des déficits budgétaires. Car, une fois que le taux moyen payé sur l’encours de la dette sera supérieur à la croissance nominale à long terme, nous pourrions nous retrouver dans une spirale négative due à l’effet boule de neige. Nous n’en sommes pas encore là en Belgique mais cette année a vu l’inversion de la tendance des taux baissiers que nous connaissons depuis plusieurs dizaines d’années. Et si les marchés obligataires perdent confiance, le taux du marché pourrait rapidement grimper de plusieurs dizaines de points de pourcentage, comme l’a récemment (et douloureusement) vécu le Royaume-Uni. Mieux vaut prévenir que guérir et il vaut donc mieux commencer dès à présent à vivre selon nos moyens.

Repricing du monde
En 2022, les classes d’actifs ont connu un repricing à cause de la hausse des taux. Il est intéressant de noter que les parties spéculatives du marché – et donc aussi le secteur technologique – qui ont le plus profité des taux ultra bas, sont également celles qui souffrent le plus aujourd’hui. Les actifs dont les bénéfices sont élevés mais à long terme sont les plus sensibles à la hausse des taux.

Philippe Gijsels: «La grande différence entre les précédentes baisses (comme lors de la crise financière de 2008) et les plus récentes (pendant la pandémie) est que, cette fois, le marché obligataire n’a pas compensé – pas même partiellement – la baisse des marchés d’actions. Suite à l’envol des taux, ces deux classes d’actifs ont baissé simultanément. En d’autres termes, dans un environnement inflationniste, la corrélation entre les deux n’est plus négative, ce qui rend plus difficile l’élaboration d’un portefeuille diversifié. 

D’autre part, il est aujourd’hui possible – et pour la première fois depuis de nombreuses années – d’obtenir du rendement des obligations, ce qui a réveillé l’intérêt des investisseurs pour ces actifs. Dans un monde ayant évité les risques pendant une grande partie de l’année, le dollar américain s’est bien comporté en tant que valeur refuge. En outre, le billet vert a également profité de l’augmentation du différentiel d’intérêt par rapport aux autres blocs comme l’Europe et le Japon. En effet, la banque centrale américaine a relevé ses taux plus vite et plus nettement que les autres. Enfin, les pays émergents ont également connu une année difficile à cause de la hausse du dollar américain, du relèvement des taux et de la crainte d’une vague de démondialisation.

La situation va-t-elle s’améliorer?
Au cours des prochaines semaines, les astres semblent favorables à un rallye de fin d’année. Les derniers chiffres de l’indice des prix à la consommation aux États-Unis permettent d’espérer que l’inflation a atteint son pic. Cela devrait permettre aux banques centrales – en particulier à la Réserve Fédérale – d’actionner un peu moins fort le frein monétaire. Le rythme de hausse des taux pourra quelque peu ralentir et nous devrions avoir davantage de visibilité sur le terminal rate.

En outre, si le ralentissement économique attendu n’est pas trop important et que les bénéfices des entreprises ne subissent pas trop de pression, toutes les conditions d’une amélioration du marché seront réunies. Des conditions que nous attendons depuis longtemps. S’y ajoute le fait que les mois de novembre, décembre et janvier sont traditionnellement de bons mois pour les marchés d’actions. C’est encore plus le cas les années d’élections de mi-mandat aux États-Unis. Depuis 1950, ces années de mid-term elections ont toujours été positives entre novembre et avril, quel que soit le parti ayant remporté les élections. Le passé n’est bien entendu jamais une garantie pour le futur, mais comme Mark Twain l’a un jour déclaré : « History does not repeat itself, but it often rhymes. »

L’évolution des marchés en 2023 dépendra de l’inflation. Si celle-ci repart et que les banques centrales doivent s’engager dans un nouveau cycle de hausse des taux, toutes les classes d’actifs pourraient à nouveau souffrir. N’oublions pas que, durant la période 1979-1980, Paul Volcker a eu besoin de deux cycles de hausse des taux pour maîtriser l’inflation. Par ailleurs, il y a toujours un risque que la récession soit plus profonde et plus longue qu’attendu. Toute nouvelle escalade de la guerre en Ukraine et toute nouvelle pénurie sur les marchés énergétiques sont également des facteurs de risque. Tout comme une nouvelle implosion de l’économie chinoise au lieu d’une amélioration.

Opportunités
Bien entendu, il est possible que « Mister Market » évite ces écueils ainsi que d’autres (les cygnes noirs étant par définition imprévisibles). Le repricing du monde a ramené de nombreuses classes d’actifs à des prix plus raisonnables. Et, partant du principe que nous devrons vivre encore longtemps dans un environnement d’inflation structurellement élevée, nous continuons à miser sur les actifs réels. Mais, dans un monde où les banques centrales contrôlent moins bien la situation, nous serons immanquablement confrontés à davantage de volatilité, ce qui créera des risques et des défis, mais aussi des opportunités. Cela vaut également pour les matières premières et les devises, où la volatilité a beaucoup augmenté ces dernières années. Peut-être 2023 sera-t-elle pour la première fois depuis longtemps également une bonne année pour les pays émergents ?

Philippe Gijsels: «Sur le plan des investissements, il est plus que jamais important dans ce contexte difficile de miser sur les thèmes qui évoluent dans le sens du courant. En d’autres termes, des idées et des opportunités à long terme qui attireront les capitaux, presque indépendamment de la conjoncture. Parmi les exemples, nous pouvons citer les énergies alternatives, les infrastructures, les soins de santé, mais aussi les thèmes liés à la technologie comme la robotique et la cybersécurité.»

Note : Les opinions exprimées dans ce communiqué de presse sont celles du Chief Economist et / ou du Chief Strategy Officer de BNP Paribas Fortis et ne représentent pas nécessairement la position de BNP Paribas Fortis.

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