Les faibles taux de financement pendant la période de Covid ont poussé les marchés immobiliers à des niveaux inédits dans de nombreux pays. Du dernier trimestre de 2019 au premier trimestre de 2022, les prix immobiliers nominaux belges ont augmenté de 15% selon les données de la Réserve fédérale de Dallas. J’utilise ces données parce qu’elles sont comparables au niveau international. Bien sûr, 15% est une belle performance, mais ce chiffre n’est pas si élevé que ça par rapport à des pays comme le Danemark, l’Allemagne, le Luxembourg ou les Pays-Bas avec des hausses entre 18 et 36%. Depuis le pic atteint début 2022, les prix nominaux ont baissé dans tous ces pays, atteignant même jusqu’à 11,4% en Allemagne. La Belgique a encore enregistré un gain de près de 4 %.
Ce n’est pas nouveau. Au vu des performances passées, on constate à peine des périodes de baisse des prix nominaux depuis la grande baisse de 1980-1985 en Belgique. Sur les autres marchés immobiliers européens – et internationaux –, les prix immobiliers évoluent beaucoup plus avec le cycle économique et des taux d’intérêt.
Demande stable et sensibilité limitée aux taux d’intérêt
Cinq facteurs expliquent les faibles fluctuations de prix en Belgique : une demande stable, une faible vulnérabilité à l’évolution des taux, des déménagements moins fréquents des ménages, une spéculation limitée et une croissance limitée de l’offre.
La demande stable est due à des raisons culturelles : le Belge a une brique dans le ventre, et les autorités l’encouragent avec des avantages fiscaux et des primes. La Belgique a également une population riche et l’indexation automatique des salaires garantit un remboursement rapide, surtout en période d’inflation. Pour la plupart des gens, le montant des remboursements est également fixe. Plus de 80% des prêts hypothécaires ont un taux fixe pour une durée d’au moins 10 ans. Cela offre une certaine sécurité en période de hausse rapide des taux d’intérêt.
La taille limitée de notre pays présente également des avantages. Les personnes qui travaillent en Belgique ne doivent généralement pas déménager lorsqu’un autre emploi leur est proposé. C’est différent dans les grands pays comme l’Allemagne ou la France. Un Parisien qui se voit proposer un nouvel emploi à Lyon se voit souvent contraint de déménager.
Une grande mobilité n’est d’ailleurs absolument pas promue en Belgique. Les frais de transaction élevés – la quatrième raison – y contribuent. Avec un coût total moyen de 16,85%, la Belgique est le deuxième pays européen le plus cher en termes de coûts totaux d’achat et de vente. Par conséquent, cette plus grande stabilité immobilière n’est pas gratuite.
Offre limitée par... la surface déjà bâtie
La dernière raison de notre grande stabilité réside dans l’offre. Aux États-Unis, les promoteurs immobiliers réagissent comme des yoyos aux vagues de prix : en cas de hausse des prix, le nombre de nouveaux projets de construction devient excessif ; en cas de baisse, tout s’arrête. En Belgique, cette élasticité des prix de l’offre de logements est quasiment inexistante. La principale raison est que la surface déjà bâtie en Belgique est déjà très élevée. Avec un peu plus de 11% de surface bâtie en pourcentage de la surface totale disponible, nous sommes champions du monde. En outre, la réglementation en matière d’aménagement du territoire est relativement stricte par rapport à d’autres pays. Le risque de créer une suroffre est limité.
Tous ces facteurs contribuent à la stabilité relative des prix immobiliers belges. Cela devrait également se traduire par une plus grande stabilité macroéconomique et financière. Un bel avantage, mais cela a donc un coût.