Pour les taux d’intérêt à court terme aux États-Unis, les marchés anticipent désormais une baisse de 5,5% (limite supérieure de la fourchette des taux de la Fed) à 4,5% d’ici fin 2024, contre 4,80% en juillet, puis une baisse à 3% ou 3,25% d’ici fin 2025, contre 3,5% à 3,75% précédemment. Ces ajustements sont significatifs. De notre côté, nous prévoyons des taux respectifs de 5% et 4% pour la fin 2024 et 2025.
La Fed ajuste sa stratégie face à l’inflation
À Jackson Hole, le rendez-vous annuel incontournable des banquiers centraux, le président de la Fed, Jay Powell, a laissé entrevoir la semaine dernière une première baisse des taux pour septembre. Il a souligné le double mandat de la Fed : contrôler l’inflation tout en maximisant l’emploi. Rappelons qu’en 2020, la Fed a modifié sa politique pour accorder une plus grande importance au plein emploi, acceptant des périodes d’inflation moyenne plus élevée pour atteindre cet objectif. L’inflation a considérablement diminué ces derniers mois, passant sous la barre des 3%. Toutefois, la dernière étape pour atteindre les 2% reste toujours la plus difficile.
La BCE réagit
C’est certainement l’opinion de Philip Lane, l’économiste en chef de la BCE. Atteindre l’objectif d’inflation de 2% « n’est pas encore assuré », a-t-il déclaré après le message optimiste de Powell. Selon lui, les taux d’intérêt devront rester restrictifs encore un certain temps. Lane souhaitait clairement réagir aux contrats à terme de la BCE, qui ont également chuté fortement le mois dernier dans le sillage de ceux de la Fed, passant à 3,2% (contre 3,25% - 3,5% avant) d’ici fin 2024 et à 2,00% - 2,25% d’ici fin 2025 (contre 2,5%). BNP Paribas anticipe une baisse légèrement moins importante à 3,25% et 2,5%. Toutefois, la BCE ne peut se permettre de suivre une trajectoire très différente de celle de la Fed. Suite aux chiffres décevants de l’emploi et à la chute des marchés boursiers, l’euro est passé de 1,08 à 1,12 dollar. L’écart de taux entre les obligations à long terme allemandes et américaines s’est réduit de plus de 20 points de base.
Inflation et chômage : le dilemme de la Fed
L’inflation américaine recule. La principale raison qui incite la Fed à changer de cap reste bien sûr la hausse du chômage observée ces derniers mois. Cela suggère que la politique monétaire est trop restrictive. Malgré la baisse du taux d’intérêt à long terme d’un point de pourcentage depuis avril, le taux réel (obligations à 10 ans moins l’inflation) reste encore d’environ 1,35%. Pourtant, le taux neutre (le taux auquel l’économie n’est ni stimulée ni ralentie) – le « R* » pour ceux qui veulent impressionner lors de réceptions – est généralement estimé entre 0,25% et 1,25%. Par conséquent, pour ne pas ralentir davantage l’économie américaine, le taux doit encore baisser.
Bourse : tendance haussière ou correction à venir ?
Le mois dernier, les marchés boursiers ont profité de la perspective d’une baisse des taux. Mais cette tendance haussière se maintiendra-t-elle dans les mois à venir ? Tout dépendra du caractère proactif ou réactif des baisses de taux. Si celles-ci réussissent à éviter une récession brutale, les actions devraient poursuivre leur progression. En revanche, si une récession se profile, une correction semble inévitable. Pour l’instant, nos collègues américains restent confiants dans l’hypothèse d’un « soft landing ».