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Microéconomie
02.11.2017
Arne Maes Senior Economist

BIT : petit coup de pouce

La semaine dernière, la Behavioural Insights Team (BIT) a publié son rapport annuel. La BIT est une institution publique qui se consacre aux applications des sciences du comportement dans la vie réelle. Elle est soutenue financièrement par le gouvernement britannique. Elle dispose de bureaux à Londres, New York, Singapour et Sydney, et emploie environ 100 collaborateurs.

Coup de pouce

Le lauréat du Prix Nobel d’économie Richard Thaler a participé à la création de la BIT en 2010. Avec leur livre « Nudge » (« Coup de pouce ») publié en 2008, Thaler et Cass Sunstein ont rendu l’économie comportementale accessible au grand public. Tout comme un autre lauréat Kahneman avec son ouvrage transcendant – « Thinking Fast Slow » – où il documente en détail les nombreux partis pris et préjugés qui obscurcissent la rationalité humaine.

Alors que Kahneman cherchait surtout à éduquer l’homme de la rue, Thaler et Sunstein s’adressent plutôt aux entreprises et organisations (publiques). Le titre du livre se réfère aussi au « coup de pouce » qui suit du développement de ce que l’on appelle l’architecture du choix. Celle-ci devrait permettre à l’utilisateur (un client ou un citoyen ou…) de faire le « bon » choix.

Expériences comportementales

Ces douze derniers mois, la BIT a généré des résultats intéressants. Lors d’une de ses expériences, les chercheurs ont envoyé à des chauffards une lettre dans laquelle ils expliquaient pourquoi les autorités ont fixé des limitations de vitesse. Pendant les six mois suivants, le nombre de récidivistes a baissé de 20%.

Pour réduire la consommation de boissons sucrées, la BIT a installé de grands panneaux dans les hôpitaux, pour attirer l’attention des consommateurs sur la quantité importante de sucre contenue dans certaines boissons. Ce qui est intéressant, c’est que non seulement les ventes de boissons sucrées ont reculé, mais on a constaté une modification de comportement en faveur de l’achat de boissons plus « saines ».

Dans le domaine du financement des pensions également, les chercheurs ont enregistré des résultats positifs. La BIT a examiné le système - notoirement complexe - des pensions au Royaume Uni. Elle en a repris les principales données dans un simple « passeport pension ». Les utilisateurs de ce passeport se sont montrés plus proactifs dans la gestion de leur propre pension, avec comme conséquence probable, de meilleurs choix financiers.*

Plus = mieux ?

Dans leur rapport, les chercheurs mettent surtout l’accent sur la « scalabilité » des résultats obtenus. Différentes expériences ont donné d’excellents résultats avec un échantillon limité. Elles devraient désormais être mises en œuvre au-delà des frontières.

Sur ce plan, la BIT se trouve sur la bonne voie. Différents projets ont été lancés en collaboration avec les autorités de pays partout dans le monde. Au Mexique, un SMS a été envoyé à près de 750.000 PME, deux semaines avant la date limite de remise de leur déclaration fiscale. Le nombre de déclarations rentrées dans les temps a augmenté de plus de 20%.

Il est clair que les conclusions de Kahneman et de Thaler pourraient avoir un impact gigantesque sur la société. Mieux les chercheurs comprendront la psychologie humaine, mieux ils pourront l’utiliser, au bénéfice de la collectivité. Mais les choses pourraient se passer différemment.

De nombreuses entreprises aimeraient en effet disposer de ces connaissances pour proposer leurs produits aux consommateurs de manière encore plus ciblée. Et nous ne dirons rien des politiciens roublards qui pourraient les utiliser pour tenter de remporter les élections. C’est une bonne chose que la BIT soit aussi transparente dans sa communication.

^ Au cours des dernières années, Kahneman s’est aussi occupé de mettre ses hypothèses en application. En plus de Gary Becker et Steven Levitt, la société « The Greatest Good » compte dans ses rangs d’autres célébrités du monde académique, mais on connaît au final peu de choses sur l’entreprise.

* Grâce à Thaler, plus de 30 milliards de dollars supplémentaires auraient été versés ces dix dernières années dans les fonds de pension grâce aux souscriptions automatiques, une forme rudimentaire de « Nudge » 

Les opinions exprimées dans ce blog sont celles des auteurs et ne représentent pas nécessairement la position de BNP Paribas Fortis.
Arne Maes Senior Economist
Arne Maes (né en 1985 à Ekeren) détient un Master of Science en Ingénierie commerciale de l’université d’Anvers, avec spécialisation en politique économique. Au sein de la banque, Arne est expert en économie belge et travaille, de surcroît, à la création et l’entretien des modèles de prévision du service, ainsi qu’au développement de nouvelles idées de recherche. En savoir plus

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